"Kaé ou les deux rivales" de Sawako Ariyoshi

Publié le par Nathalie

"Kaé ou les deux rivales" de Sawako Ariyoshi

Née en 1931, Sawako Ariyoshi est morte, à Tokyo, en 1984. Elle a étudié la littérature et le théâtre à la Tokyo Woman's Christian University, et en 1959, elle s'est rendue à New York pour étudier au Sarah Lawrence College. Elle a très tôt connu un immense succès avec des romans, des nouvelles et des pièces de théâtre qui traitent souvent de la condition féminine. Au Japon, on l'a souvent comparé à Simone de Beauvoir qu'elle admirait sans réserve. "Kaé ou les deux rivales" est la troisième de ses 4 œuvres traduites en français. Le roman est paru en 1980 chez Stock et a été réédité en 2015 chez Mercure de France. Il est inspiré par un personnage historique, le chirurgien Hanaoka Seishu, et sa femme qui l'aida à expérimenter un médicament aux vertus anesthésiantes. La partie concernant les relations entre Kaé et sa belle-mère n'est cependant que pure fiction romanesque.

4ème de couv' : " Vers 1785, dans une petite ville japonaise. La jolie et douce Kaé va épouser par procuration le jeune et brillant Umpei, retenu pour plusieurs années encore à Tokyo où il étudie la médecine. C’est alors une coutume au Japon : un mariage « virtuel » célébré en bonne et due forme, mais en l’absence du mari. Kaé va donc aller vivre chez ses beaux-parents en attendant le retour d’Umpei, qu’elle n’a jamais vu.
Au début, elle est très heureuse, subjuguée par la beauté et le charme de sa belle-mère, l’impérieuse Otsugi, qui lui manifeste beaucoup d’affection. Mais tout change quand arrive Umpei, la prunelle des yeux de sa mère, qui voit sa belle-fille comme une rivale qu’il lui faut dominer entièrement.
Umpei, lui, se consacre à son métier de chirurgien, avec une obsession : mettre au point un anesthésique suffisamment puissant pour pouvoir opérer les cancers, du sein plus particulièrement. Il commence par faire des expériences sur des animaux, mais quand au bout de dix ans, il pense avoir trouvé, il va devoir se tourner vers des cobayes humains – Otsugi et Kaé se proposent toutes les deux – les deux rivales qui maintenant se haïssent et se disputent son amour. Laquelle sortira victorieuse de cet atroce combat, dont l’auteur ne nous épargnera aucun cruel moment ?
"

Dans le Japon traditionnel de la fin du XVIIIème siècle, nous suivons la rivalité entre une belle-mère et sa bru. Le plus étrange étant qu'Otsugi a pourtant choisi elle-même la douce Kaé pour épouser son fils aîné.

Je connais un petit peu la littérature japonaise pour avoir lu quelques livres (ici, ou encore ici), mais j'avoue qu'à chaque fois j'ai l'impression d'évoluer dans un autre univers, loin de mes repères d'occidentale, tellement la culture nippone est différente de la nôtre.

Les relations familiales, le dévouement des femmes de la famille pour le père ou le fils aîné, les histoires de hiérarchie sociales sont toujours très intéressantes à découvrir et à analyser. En plus, ici, la trame du récit s'appuie sur une vérité historique et médicale concernant les travaux d'Umpei pour parvenir à anesthésier ses patients afin de traiter des cancers, dont celui très meurtrier touchant les seins des femmes.

Le livre est très bien documenté, les passages médicaux clairs et simples à suivre. Ce qui donne de la force à cette histoire, c'est la terrible relation qui s'installe entre les deux femmes dès le retour d'Umpei au foyer après ses études. Chacune épie l'autre, tente de tirer la couverture à elle. Elles sont même prêtes à se mettre en danger pour un fils, un mari qui semble surtout plus intéressé par son travail et ses recherches. Il est effrayant de voir à quel point elles sont capables de jalousie, de méchanceté et de ruse afin de parvenir à leurs fins. La nature féminine dans toute sa splendeur mais pas sous l'éclairage le plus flatteur ni le plus lumineux...

Un roman intense et prenant.

Note : 4,25/5

Passage choisi : "C'est pour cela que les sœurs du maître de la famille sont considérés comme inutiles et envoyées ailleurs en tant que brus. Cela doit avoir été comme cela depuis toujours, et cela continuera éternellement. car les hommes et les femmes existeront toujours les uns et les autres, même si la famille cesse d'être. Moi, je ne veux plus renaître femme dans un monde pareil. Mon plus grand bonheur dans la vie, c'est justement de ne m'être jamais mariée. j'ai réussi à n'être ni bru ni belle-mère."

Publié dans ROMANS DU MONDE

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