"La rédaction" de Antonio Skarmeta
"La rédaction" , publiée chez Syros, est une nouvelle devenue un album jeunesse. Son auteur, Antonio Skarmeta, chilien contraint de s'exiler en Europe après le coup d'état de 1973, a écrit de nombreux récits et romans. Il a reçu le Prix du livre de jeunesse sur la tolérance, décerné par L'UNESCO, en 2002, grâce à "La rédaction", ouvrage duquel il dit : " J'ai voulu faire les images d'un reportage. "
Pedro, petit garçon de neuf ans, est en CE2. Il vient de fêter son anniversaire et a reçu un ballon comme cadeau. Après l'école, il aime jouer au football avec ses amis. Le soir, après le repas, ses parents écoutent la radio et souvent sa mère semble triste et cache des larmes. Il faut dire que dehors, les militaires sont partout et que le pays est devenue une dictature. Pedro ne comprend pas bien ce qui se passe jusqu'au jour où le père de son ami Daniel est arrêté sous ses yeux. Un jour, un soldat vient à l'école et demande aux élèves d'écrire une rédaction sur le sujet "Ce que fait ma famille le soir".
Voici une histoire toute en émotion et pudeur qui raconte la dictature militaire vue par les yeux d'un enfant. Le cheminement de pensée de Pedro qui est loin de se douter des implications d'un tel mode de gouvernement et qui peu à peu va s'éveiller aux tracas des adultes est très bien mené.
On se demande comment il va réagir à la ruse des soldats qui cherchent à espionner les familles à travers la plume des enfants. Le dénouement est intéressant et apporte une note d'humour qui allège un peu ce sujet parfois pesant.
En plus, cette histoire peut parler de toutes les dictatures, ce qui la rend universelle, car il n'y a aucune référence de temps ou de lieu dans le récit de Skarmeta.
Un livre que l'on peut offrir à un enfant à partir du CM1 à condition de lui expliquer ce qu'est "la dictature" et de s'assurer de sa compréhension car il y a beaucoup d'implicite dans ce très beau texte.
Note : 4.5/5
Passage choisi :
« Pourquoi ils l'ont emmené ? », demanda-t-il.
- Mon papa est de gauche, dit Daniel en enfonçant les mains dans ses poches et en serrant les clés dans son poing.
- Qu'est-ce que ça veut dire ?
- Qu'il est antifasciste. »
Pedro avait entendu ce mot-là les soirs où son père avait l'oreille collée à la radio verte, mais il ne savait pas encore ce qu'il signifiait et, en plus, il avait du mal à le prononcer."