- Tu, mio - de Erri De Luca

Publié le par Nathalie

- Tu, mio - de Erri De Luca

Erri De Luca (né Henry De Luca) est un écrivain, poète et traducteur italien. D'origine bourgeoise et destiné à une carrière de diplomate, il s'y refuse et rompt avec sa famille pour, en 1968, rejoindre le mouvement de révolte ouvrière. Il multipliera les métiers manuels : ouvrier spécialisé chez Fiat à Turin, manutentionnaire à l'aéroport de Catane, maçon, conducteur de camions. De son père, il conserve son amour pour les livres. Bien qu'il ait commencé à écrire jeune, son premier livre ne paraît qu'en 1989 ("Une fois, un jour"). Il a obtenu le prix Femina en 2002 pour "Montedidio" et le Prix européen de littérature en 2013.

"Tu, mio" (Folio - 2006) est un court roman d'apprentissage de 141 pages. Il s'agit d'un cadeau. Ma tante n'a pas choisi le livre mais a pris au hasard la sélection "surprise" (déjà emballée) d'une librairie qu'elle fréquente quand elle vient sur Paris. Belle découverte !

4ème de couv' : "«Je comprenais mal pourquoi la virilité devait ignorer la douleur. Je la voyais appliquée aux hommes, j’essayais de la reproduire quand mon tour venait.
Lorsque j’arrivai sur la plage, mon effort pour me taire m’avait donné de la fièvre et Daniele montra à tout le monde la gloire de ma blessure. La curiosité d’une jeune fille jamais vue jusque-là, le contact de ses mains avec la mienne pleine de trous, chassèrent ma douleur de là aussi. Elle s’appelait Caia.»
Années cinquante, sur une île de pêcheurs. Un garçon de seize ans passe l’été dans la famille de son oncle. Il y côtoie un groupe de jeunes gens, dont Daniele, son cousin, et Caia, une mystérieuse jeune femme d’origine juive. Cette rencontre décisive va amorcer en lui une prise de conscience de la complexité de la condition humaine.
"

Immergé au cœur des années 50, sur l'île d'Ischia, le héros fait l'apprentissage de la pêche, de l'amour et découvre la complexité des relations humaines après-guerre. Entre parties de pêche sur le bateau de son oncle avec Nicola, le pêcheur taiseux, sorties avec des jeunes gens un peu plus âgés, comme son cousin Daniele, et moments passés avec Caia, l'été du narrateur est bien rempli.

Indolence du Sud de l'Italie, chaleur estivale et frémissement des premières amours sont bouleversés par une rencontre et une connexion atypique avec une jeune fille d'origine juive, renvoyant à la compréhension d'un passé proche, souvent tu, pour ne pas réveiller les mauvais souvenirs et les plaies encore béantes.

J'ai beaucoup aimé le cheminement du héros qui se découvre et découvre également le monde qui l'entoure avec ses passions et ses horreurs. Il entretient avec Caia une relation d'une grande proximité, grâce à un biais original trouvé par l'auteur, qui m'a surprise.

Texte court et poétique où les mots sont pesés, comptés pour donner une impression de retenue et une atmosphère intimiste à ce récit initiatique d'un adolescent qui entre de plein fouet dans l'âge adulte.

Note : 4,25/5

Passage choisi : "On obtient de la mer ce qu'elle nous offre, non pas ce que nous voulons. Nos filets, nos palangres, nos nasses sont une question. La réponse ne dépend pas de nous , les pêcheurs. Ceux qui vont là-dessous chercher la réponse avec leurs mains se croient plus forts que la mer. Seule la surface nous revient, ce qui est en-dessous lui appartient, c'est sa vie. Nous frappons à sa porte, à fleur d'eau, nous ne devons pas entrer chez elle en maîtres."

Publié dans ROMANS

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article