"Le Club des Incorrigibles Optimistes" de Jean-Michel Guenassia
Encore un livre qui m'arrive du Sud via mon réseau de "prêteurs" !!! Le titre et la photo de couv', très "Doisneau", m'ont tout de suite attirée. Cet ouvrage est à la fois "le roman d'une génération " et "la chronique mélancolique d'une adolescence" d'après son auteur, Jean-Michel Guenassia.
Au moment de sa sortie chez Albin Michel en août 2009, "Le Club des Incorrigibles optimistes" a été salué par la critique et il a remporté le Goncourt des lycéens la même année et le Prix des lecteurs de Notre Temps en 2010.
Ce roman chorale retrace à la fois une époque, celle des années 60, avec l'apparition du rock'n roll, la guerre froide et la guerre d'Algérie, et l'adolescence de Michel Marini, de 12 à 17 ans, avec ses passions, ses espoirs et ses amours.
L'histoire débute, en 1980, par un enterrement. On devine qu'il s'agit de celui de Jean-Paul Sartre. Michel, devenu adulte, y croise une figure de son passé, Pavel, un communiste réfugié en France. A cette occasion, Michel va se remémorer son adolescence, de l'automne 1959 à l'été 1964. Il va nous raconter sa vie. Sa famille, les Marini, d'un côté, travailleurs d'origine italienne à tendance communiste, et les Delaunay, de l'autre, bourgeois bien pensant prospérant grâce au commerce familial et aux relations du grand-père. Ses années dans des établissements scolaires réputés de la capitale, sa passion pour le baby-foot, les échecs, la photographie et la lecture, et sa rencontre avec le Club des incorrigibles Optimistes dans l'arrière salle de son bistrot préféré.
A force de fréquenter le baby-foot du Balto, Michel va se rendre compte qu'il existe derrière une petite porte de ce café, une pièce dans laquelle se réunissent des réfugiés des pays de l'est ayant fui leur patrie pour diverses raisons. A force de patiente et de silence, il va réussir à se faire admettre dans ce cercle très fermé mais résolument optimiste, et va ainsi découvrir l'histoire de la guerre froide ainsi que celles de Pavel, Leonid, Igor ou encore Sasha.
Entre ses problèmes familiaux, ses peines de coeur et ses craintes pour un frère dont les actions, en pleine guerre d' Algérie, vont diviser la famille, Michel trouvera un refuge au sein du club et des amitiés sincères qui l'aideront à affronter les affres de l'adolescence et à devenir un homme.
J'ai énormément apprécié ce livre résolument optimiste qui a su mêler petite et grande histoire. N'ayant pas connu les années 60, j'ai vu dans ce roman un échantillon de ce que pouvaient être ces années après guerre en pleine effervescence sociale, politique et culturelle. Ce roman, au rythme enlevé, qui se construit autour d'un tricotage habile d'épisodes de la vie de Michel et de flash-backs expliquant la présence des différents membres du club sur le sol français m'a littéralement happée. J'ai y redécouvert une période de l'histoire de France tout en suivant le quotidien d'un personnage attachant, passionné et exalté. Un vrai moment de lecture plaisir...
Note : 4,25/5
Passage choisi : "J'avais horreur de perdre mon temps. La seule chose qui me paraissait utile, c'était de lire. Chez nous, personne ne lisait vraiment. Ma mère mettait une année à lire le Livre de l'année, ce qui lui permettait d'en parler et de passer pour une grande lectrice. Mon père ne lisait pas et s'en vantait.
Franck avait des livres politiques dans sa chambre. Grand-père Philippe n'avait d'estime que pour Paul Bourget dont il avait adoré les romans dans sa jeunesse.
- On dira ce qu'on voudra, la littérature, avant-guerre, c'était autre chose.
Il achetait des livres de collection dans les boutiques de la rue de l'Odéon. Il ne les lisait pas et se faisait une bibliothèque. Moi, j'étais un lecteur compulsif. Ça compensait le reste de la famille. Le matin, quand j'allumais la lumière, j'attrapais mon livre et il ne me quittait plus. Ça énervait ma mère de me voir le nez fourré dans un bouquin."