- Là où chantent les écrevisses - de Delia Owens
Phénomène du monde de l'édition, "Là où chantent les écrevisses" (Seuil - janvier 2020) est le premier roman de Delia Owens, américaine diplômée en zoologie et biologie qui avait, jusque-là, surtout consacré sa plume à l'écriture d'ouvrages sur la nature et les animaux. "Là où chantent les écrevisses" a déjà su conquérir des millions de lecteurs de par le monde et son adaptation cinématographique serait en cours.
4ème de couv' : "Pendant des années, les rumeurs les plus folles ont couru sur "la Fille des marais" de Barkley Cove, une petite ville de Caroline du Nord. Pourtant, Kya n'est pas cette fille sauvage et analphabète que tous imaginent et craignent.
A l'âge de dix ans, abandonnée par sa famille, elle doit apprendre à survivre seule dans le marais, devenu pour elle un refuge naturel et une protection. Sa rencontre avec Tate, un jeune homme doux et cultivé qui lui apprend à lire et à écrire, lui fait découvrir la science et la poésie, transforme la jeune fille à jamais. Mais Tate, appelé par ses études, l'abandonne à son tour.
La solitude devient si pesante que Kya ne se méfie pas assez de celui qui va bientôt croiser son chemin et lui promettre une autre vie.
Lorsque l'irréparable se produit, elle ne peut plus compter que sur elle-même..."
J'ai longuement entendu parler de cet ouvrage, bien avant de le découvrir par moi-même : les magazines, les libraires, mes amies... Je n'ai rencontré personne qui me déconseille l'histoire de "la fille des marais". Au contraire... Et puis, finalement, on me l'a prêté (Merci Anne-C !) et je m'y suis plongée avec délice.
Deux récits en parallèle.
L'enfance de Kya, abandonnée par les siens, qui se retrouve à vivre seule dans le marais. Récit initiatique d'une petite fille, sorte de sauvageonne en osmose avec son environnement naturel, qu'un garçon arrive à apprivoiser, et qui, en lui offrant le savoir grâce à l'apprentissage de la lecture, va transformer à jamais sa destinée.
L'enquête sur le décès suspect de Chase Andrews, coqueluche de sa petite ville de Caroline du Nord, retrouvé mort au pied de la tour de guet, au cœur des marécages. Accident ou meurtre ? La police locale se lance le défi de comprendre ce qui s'est passé malgré le peu d'indices disponibles.
Bien entendu, les deux histoires se retrouvent rapidement mêlées.
Ce qui m'a plu dans ce roman, ce n'est pas l'enquête policière, qui bien qu’habilement menée, n'en reste pas moins assez simple. Ce qui m'a plu, c'est la capacité de l'auteure à nous faire vivre, sentir, entendre le marais grâce à son héroïne. Les descriptions sont superbes, la vie de Kya dans ce milieu qui pourrait sembler hostile apparait cependant comme en parfaite adéquation avec la nature. Nature qui est, finalement, le personnage principal du livre. La faune et la flore sont parfaitement décrites. L'ambiance qui règne autour de Kya quand elle se promène dans son marais est tout bonnement féérique.
Ce livre est un vrai cri d'amour envers la Nature et sa préservation grâce à sa connaissance et à sa reconnaissance. En effet, de prime abord, l'idée de choisir un marais comme lieu pour cette intrigue peu sembler rébarbatif car semblant dépourvu de charme. Mais avec sa façon de le décrire, Delia Owens en fait un endroit enchanteur et attirant, loin de l'image glauque que l'on peut en avoir au départ.
Ce roman est aussi une histoire qui parle de résilience, d'amitié, d'amour, de racisme, de différence, de tolérance et de rejet. Bref, un récit dense et intéressant à différents niveaux.
Une lecture très agréable, qui sort des sentiers battus, et qui ouvre les yeux sur un milieu spécial qui ne demande qu'à être découvert (et protégé)...
Note : 4,5/5
Passage choisi : "Un marais n’est pas un marécage. Le marais, c’est un espace de lumière, où l’herbe pousse dans l’eau, et l’eau se déverse dans le ciel. Des ruisseaux paresseux charrient le disque du soleil jusqu’à la mer, et des échassiers s’en envolent avec une grâce inattendue – comme s’ils n’étaient pas faits pour rejoindre les airs – dans le vacarme d’un millier d’oies des neiges.
Puis, à l’intérieur du marais, çà et là, de vrais marécages se forment dans les tourbières peu profondes, enfouis dans la chaleur moite des forêts. Parce qu’elle a absorbé toute la lumière dans sa gorge fangeuse, l’eau des marécages est sombre et stagnante. Même l’activité des vers de terre paraît moins nocturne dans ces lieux reculés. On entend quelques bruits, bien sûr, mais comparé au marais, le marécage est silencieux parce que c’est au cœur des cellules que se produit le travail de désagrégation. La vie se décompose, elle se putréfie, et elle redevient humus : une saisissante tourbière de mort qui engendre la vie."